0.1 – « COP21/ l’accord de Paris adopté par 195 pays : À la surprise générale, au début d'une plénière attendue depuis le début de la journée et qui tardait encore pourtant à se mettre en branle, M. Fabius, a invité la COP21 à adopter le document, tout à fait banalement et sans aucune objection. Il a ainsi signé sa victoire, devant l'assemblée qui l'a ensuite acclamé. C'est une grande victoire pour la diplomatie française qui voulait à tout prix éviter l'échec de la conférence précédente à Copenhague en démontrant que les négociations multilatérales peuvent fonctionner. Mais c'est aussi une victoire pour la diplomatie canadienne du jeune gouvernement Trudeau, qui y a fait un de ses premiers tours de piste, qui a joué sa partie et qui voulait marquer une rupture avec le précédent gouvernement Harper hostile à ce genre d'exercice. La ministre de l'Environnement, Catherine McKenna, avait même été choisie comme facilitatrice pour rapprocher les parties par Laurent Fabius. »
0.2
– « COP21/ l’accord de Paris adopté par 195 pays : L'accord en bref
. L'entente prévoit un financement minimal de 100 milliards de dollars
américains par an des pays développés pour aider les pays pauvres à lutter
contre les changements climatiques, avec des mécanismes de révision à la
hausse. Un nouvel objectif chiffré sera annoncé avant 2025.
. L'accord reconnaît notamment la notion de justice climatique et de
différenciation, c'est-à-dire les efforts financiers que les pays riches et
pauvres doivent faire pour lutter contre les changements climatiques, en
fonction de leurs responsabilités et de leurs moyens.
. Le texte contient aussi la révision à la hausse des engagements, c'est-à-dire
un cycle quinquennal toujours à la hausse des engagements de réduction des gaz
à effet de serre de chaque pays. Mais il n'y a pas d'indication sur la date de
la première révision des engagements des pays et rien sur la révision des
efforts avant 2020. »
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1 - COP21 : l’accord de Paris adopté par 195 pays
Au terme de deux semaines d’intenses tractations, 195 pays ont adopté, samedi 12 décembre, l’accord de Paris – un accord universel et contraignant visant à contenir le réchauffement planétaire –, marquant une étape historique dans les négociations climatiques.
Juste avant la séance plénière, le groupe du G77, qui regroupe 134 pays en développement et émergents dont la Chine, l’Inde ou encore l’Arabie saoudite – un groupe déterminant dans les négociations – s’était dit « satisfait » du texte, laissant peu de doute sur son adoption. « Nous sommes unis, tous ensemble. Nous sommes heureux de rentrer à la maison avec ce texte », avait déclaré Nozipho Mxakato-Diseko, ambassadrice sud-africaine et porte-parole du G77.
_ « Le meilleur équilibre possible »
En fin de matinée, Laurent Fabius, avait présenté le texte de cet accord en présence du président François Hollande et du secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon. Avec une très vive émotion, il avait remis un « projet d’accord ambitieux et équilibré », « juste, durable, dynamique et juridiquement contraignant ». Le texte de 29 articles et 31 pages, évoque, selon Laurent Fabius, les « responsabilités différenciées des pays » dans les efforts contre le réchauffement, dans cinq sujets différents. Il maintient un seuil de réchauffement « bien en deçà de 2 °C », en s’efforçant de le limiter à 1,5 °C. Il évoque une « nécessaire coopération sur les pertes et dommages », et fait de la somme de 100 milliards de dollars promis par les pays du Nord d’ici à 2020 une somme « plancher » pour après 2020, avec un nouvel objectif chiffré défini en 2025.
« Le temps est venu de nous concentrer non plus sur les lignes rouges, mais sur les lignes vertes d’un compromis universel », a affirmé le ministre des affaires étrangères français. Le texte est « le meilleur équilibre possible, à la fois puissant et délicat, qui permettra à chaque délégation de rentrer chez soi la tête haute et avec des acquis importants ». « Le monde retient son souffle », a-t-il conclu.
_ Hollande : « l’accord décisif pour la planète, c’est maintenant »
François Hollande a succédé à Laurent Fabius et à Ban Ki-moon à la tribune pour présenter cet « accord universel, contraignant et différencié ». Appelant à dépasser les dernières divergences et exigences pour adopter l’accord, le chef de l’Etat français a prévenu : « On ne sera pas jugés sur une phrase, mais sur un texte dans son ensemble, pas sur un mot mais sur un acte, pas sur un jour mais sur un siècle. » « Il n’y aura pas de sursis possible, l’accord décisif pour la planète, c’est maintenant », a-t-il poursuivi, recyclant son slogan de campagne.
« Le 12 décembre 2015 peut être une grande date pour l’humanité, un message de vie. Et je serais personnellement heureux, presque soulagé, fier, qu’il soit lancé de Paris, ce message-là, car Paris a été meurtri il y a tout juste un mois, jour pour jour. Nous vous demandons donc d’adopter le premier accord universel sur le climat de notre histoire. Il est rare d’avoir dans une vie l’occasion de changer le monde, saisissez-la, pour que vive la planète, vive l’humanité et vive la vie. »
_ Un « vrai tournant »
Loué comme un « vrai tournant » par Jennifer Morgan, du World Resources Institute, l’accord lance un « signal fort indiquant que les gouvernements sont engagés à s’aligner sur la science » en établissant un seuil de réchauffement à 2 °C, avec une référence au seuil de 1,5 °C, d’après Tasneem Essop, la chef de la délégation du WWF pour la COP21. « Ce dont nous avons besoin maintenant c’est qu’ils accélèrent leurs actions, en termes de réductions de leurs émissions et de soutiens financiers, pour tenir cette limite ».
Plusieurs ONG se montrent toutefois assez critiques : « Les pays à l’origine du problème ont promis trop peu d’aide pour les populations sur les lignes de front du dérèglement climatique », estime Kumi Naidoo, directeur de Greenpeace International. May Boeve, directrice de 350.org, déplore « l’exclusion de la mention sur les droits des peuples indigènes, l’absence de financement pour les pertes et dommages, et (...) le fait que les engagements actuels des pays conduisent toujours vers un réchauffement de 3 °C. » Maxime Combes, porte-parole d’Attac France sur les enjeux climatiques, dénonce lui « l’absence d’engagements chiffrés de réduction d’émissions de gaz à effet de serre pour les années à venir ; sans feuille de route clairement établie, y compris en matière de financement, nous avons affaire à un accord sans ambition... ».
_ Banderoles et fresques humaines
Pendant que les négociations s’achevaient au Bourget, la mobilisation battait son plein à Paris et en province pour réaffirmer l’urgence de l’action en faveur de la justice climatique : immense banderole de tissu symbolisant les lignes rouges des pays dans les négociations climatiques ; fresque humaine géante dessinant le message « Climate, Justice, Peace » sur une carte interactive de Paris ; minute de silence pour les victimes du réchauffement climatique... Sur le Champ de Mars, elle a réuni, selon les organisateurs, plus de 20 000 personnes, et au total plus de 30 000 personnes selon la Coalition 21 climat, qui regroupe 130 organisations de la société civile.
Le projet d’accord a été finalisé à l’aube samedi, après une troisième nuit d’affilée de négociations entre les cent quatre-vingt-quinze pays parties à la conférence de l’ONU, et au lendemain de la clôture prévue de la COP. Ces deux derniers jours, des chefs d’Etat, notamment de la Chine, des Etats-Unis, de la France, de l’Inde et du Brésil, ont eu des entretiens téléphoniques pour faire avancer les négociations. Dans la nuit de jeudi à vendredi, une réunion de négociations avait vu les positions de certains pays se raidir, faisant craindre un blocage.
Le Monde.fr/ 12.12.2015/ Mis à jour le 12.12.2015
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2 - COP21 : ce que disent les points-clés de l'accord
DÉCRYPTAGE - Les 195 pays réunis au Bourget dans le cadre de la 21e conférence sur le climat ont adopté samedi soir un accord universel juridiquement contraignant sur le climat. Un texte historique dont voici les principaux points.
_ L'objectif de long-terme ?
L'article 2 du texte stipule que le réchauffement devra être contenu «bien en deça de 2°C» par rapport à l'ère pré-industrielle (nous sommes déjà à + 0,8°C) et que des efforts devront être réalisés pour tenter de rester en-dessous de 1,5°C, conformément à ce que demandaient les pays les plus vulnérables au réchauffement (à commencer par les petits états insulaires menacés par la montée du niveau des mers). C'est un symbole important même si les spécialises du climat s'accordent à dire que le franchissement de la barre des 1,5°C est inéluctable.
_ Comment l'atteindre ?
C'est l'un des gros points noirs de l'accord: il n'y a aucun objectif chiffré de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il est simplement convenu que celles-ci devront atteindre «un pic aussi rapidement que possible», étant entendu que les pays en voie de développement l'atteindront plus tard, et qu'elles devront ensuite décroître rapidement pour atteindre un niveau où elles pourront être intégralement capturées par la végétation et les océans (c'est ce qu'on appelle la neutralité carbone) dans la 2e moitié du XXIe siècle. Cette trajectoire est loin d'assurer que le réchauffement ne dépassera pas 2°C.
_ Quel mécanisme de contrôle et de révision des engagements volontaires des pays ?
Pour le moment, les réductions d'émissions promises de façon volontaire par 186 Etats conduisent à l'émission de 55 gigatonnes de CO2 en 2030 alors qu'il faudrait atteindre 40 gigatonnes pour rester sous les 2°C. Le groupement d'experts indépendants sur le changement climatique doit déterminer d'ici 2018 quel niveau d'émissions serait compatible avec un réchauffement limité à 1,5°C. On fera à ce moment là un bilan des efforts collectifs. Les pays seront sans nul doute appelés à revoir leurs ambitions à la hausse, sur la base du volontariat, avant le nouvel inventaire prévu en 2023. Ce processus de révision sera renouvelé tous les 5 ans. Les pays devront à chaque fois revoir leur copie en rehaussant leur niveau d'ambition.
_ Comment répartir le «fardeau climatique» entre les pays ?
Ce principe de «différenciation» était au cœur des négociations. En résumé, les pays en voie de développement appelaient les pays développés à leur responsabilité historique. C'est-à-dire à faire des efforts supplémentaires. Ces derniers rechignaient à inscrire dans le marbre la vieille dichotomie pays riches/pays pauvres. Le compromis se fait dans l'article 2 du traité qui acte le le principe de responsabilités et des capacités différentes des Etats résultant de leurs «circonstances nationales différentes». Une formulation jargonneuse qui peut paraître compliquée mais dit en fait quelque chose de très simple: rien n'est figé, le monde évolue. Dans le reste de l'accord, il est reconnu que les pays développés doivent jouer un rôle moteur dans la réduction des émissions mondiales et aider financièrement les pays en voie de développement dans la lutte contre le réchauffement climatique.
_ Quid des 100 milliards de dollars promis aux pays en voie de développement à partir de 2020 ?
Ils ont été retirés du texte de l'accord mais figurent dans une annexe. Cela doit notamment permettre d'éviter un rejet du projet d'accord par le Sénat américain. Il est reconnu qu'un nouvel engagement financier précis devra être formulé en 2025. Cette somme est intégralement à la charge des pays développés. Les autres pays sont eux appelés à réaliser un effort financier supplémentaire s'ils le souhaitent (et non s'ils le peuvent comme le demandaient les pays développés). Aucune somme n'est sanctuarisée pour l'adaptation, c'est à dire pour les projets permettant aux pays en voie de développement de faire face aux conséquences du réchauffement.
_ Quelle compensation pour les conséquences irréversibles du réchauffement ?
Ils ont été retirés du texte de l'accord mais figurent dans une annexe. Cela doit notamment permettre d'éviter un rejet du projet d'accord par le Sénat américain. Il est reconnu qu'un nouvel engagement financier précis devra être formulé en 2025. Cette somme est intégralement à la charge des pays développés. Les autres pays sont eux appelés à réaliser un effort financier supplémentaire s'ils le souhaitent (et non s'ils le peuvent comme le demandaient les pays développés). Aucune somme n'est sanctuarisée pour l'adaptation, c'est à dire pour les projets permettant aux pays en voie de développement de faire face aux conséquences du réchauffement.
Par Tristan Vey / Mis à jour le 12/12/2015/ Publié le 12/12/2015
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3 - COP21 : les points clés du premier projet d’accord universel sur le climat
« Un accord différencié, juste, durable, dynamique, équilibré et juridiquement contraignant. » C’est en ces termes que le président de la COP21, Laurent Fabius, a présenté l’accord universel sur le climat qui devait être adopté par consensus, samedi 12 décembre après-midi, par les cent quatre-vingt-quinze Etats parties à la conférence. « Le texte, a-t-il ajouté, constitue le meilleur équilibre possible, un équilibre à la fois puissant et délicat, qui permettra à chaque délégation de rentrer chez elle la tête haute, avec des acquis importants. » Décryptage des points essentiels.
_ En dessous de 2 °C, si possible 1,5 °C
L’accord est plus ambitieux que l’objectif initial de la COP21, qui visait à contenir le réchauffement sous le seuil des 2 °C. Il prévoit de le maintenir « bien en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels » et de « poursuivre les efforts pour limiter la hausse des températures à 1,5 °C ». Et ce « en reconnaissant que cela réduirait significativement les risques et impacts du changement climatique. »
La mention du seuil de 1,5 °C était une revendication portée par les petits Etats insulaires menacés de submersion par la montée des mers. Elle a surtout une portée symbolique et politique, rester sous le plafond de 1,5 °C étant irréaliste en l’état actuel des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
Ce volontarisme est contrebalancé par la faiblesse de l’objectif à long terme de réduction des émissions mondiales. Il est seulement prévu de viser « un pic des émissions mondiales de gaz à effet de serre dès que possible ». Des versions antérieures retenaient un objectif de baisse de 40 % à 70 %, ou même de 70 % à 95 %, d’ici à 2050. Ces mentions, jugées trop contraignantes par certains pays, ont été gommées. A plus long terme, « dans la seconde moitié du siècle », l’objectif est de parvenir à « un équilibre » entre les émissions d’origine anthropique et leur absorption par des puits de carbone (océans, forêts ou, sans que le texte le formule explicitement, enfouissement du CO2). Rappelons que le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) juge nécessaire de baisser de 40 % à 70 % les émissions mondiales d’ici à 2050, pour éviter un emballement climatique incontrôlable.
_ « Sur la base de l’équité »
La différenciation des efforts qui doivent être demandés aux différents pays, en fonction de leur responsabilité historique dans le changement climatique et de leur niveau de richesse — ou de pauvreté — a, cette fois encore, cristallisé l’opposition entre Nord et Sud. Le texte rappelle le principe des « responsabilités communes mais différenciées » inscrit dans la Convention onusienne sur le climat de 1992.
Il pose que les efforts doivent être accomplis « sur la base de l’équité », et acte que « les pays développés continuent de montrer la voie en assumant des objectifs de réduction des émissions en chiffres absolus ». Les pays en développement « devraient continuer d’accroître leurs efforts d’atténuation (...) eu égard aux contextes nationaux différents », formulation qui prend donc en compte leur niveau de développement. Enfin, l’accord souligne qu’« un soutien doit être apporté aux pays en développement » par les nations économiquement plus avancées.
_ 100 milliards de dollars, « un plancher »
Pour solder leur « dette climatique », les pays du Nord ont promis à ceux du Sud, en 2009, de mobiliser en leur faveur 100 milliards de dollars [91 milliards d’euros] par an, d’ici à 2020. Les nations pauvres veulent davantage, après 2020, pour faire face aux impacts du dérèglement climatique, sécheresses, inondations, cyclones et montée des mers. Le texte entrouvre une porte, en faisant de ces 100 milliards « un plancher », qui est donc appelé à être relevé. De plus, « un nouvel objectif chiffré collectif » d’aide financière devra être avancé « avant 2025 ». C’est une nette avancée, même si elle laissera les pays pauvres sur leur faim.
_ Pas de compensation pour les pertes et dommages
Sur ce sujet très sensible pour les pays les plus menacés par le dérèglement climatique, l’accord reconnaît « la nécessité d’éviter et de réduire au minimum les pertes et dommages associés aux effets négatifs du changement climatique, incluant les événements météorologiques extrêmes [inondation, cyclone...] et les événements à évolution lente [montée des eaux...], et d’y remédier, ainsi que le rôle joué par le développement durable dans la réduction du risque de pertes et dommages ». Mais il se contente, de façon très générale, de mentionner que les parties « devraient renforcer la compréhension, l’action et le soutien » sur cette question. Il exclut toute « responsabilité ou compensation » des pays du Nord pour les préjudices subis par les pays en développement.
_ Des engagements revus tous les cinq ans
C’est un point essentiel de l’accord. Les « contributions prévues déterminées au niveau national » annoncées par les Etats, c’est-à-dire leurs promesses de réduction d’émissions de gaz à effet de serre, sont aujourd’hui nettement insuffisantes pour contenir le réchauffement à un maximum de 2 °C, et a fortiori de 1,5 °C. A ce jour, cent quatre-vingt-six pays, sur cent quatre-vingt-quinze, ont remis leurs contributions qui, additionnées, mettent la planète sur une trajectoire de réchauffement d’environ 3 °C. Ces engagements seront annexés à l’accord, mais ils n’en font pas partie stricto sensu. Etant volontaires, ils n’ont pas de valeur contraignante.
Le texte prévoit un mécanisme de révision de ces contributions tous les cinq ans, donc théoriquement à partir de 2025, l’accord global devant entrer en vigueur en 2020. Un « dialogue facilitateur » entre les parties signataires doit être engagé dès 2018 sur ce sujet. Pour les ONG, le rendez-vous de 2025 est beaucoup trop tardif. L’Union européenne, les Etats-Unis, le Brésil et quelque quatre-vingts pays en développement, réunis au sein d’une Coalition pour une haute ambition, qui s’est constituée durant la COP, envisageaient de prendre les devants en s’engageant à une première révision avant 2020.
_ Possibilité de retrait
L’accord, pour entrer en vigueur en 2020, devra avoir été ratifié, accepté ou approuvé par au moins cinquante-cinq pays représentant au moins 55 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Mais, « à tout moment après un délai de trois ans à partir de l’entrée en vigueur de l’accord pour un pays», celui-ci pourra s’en retirer, sur simple notification.
Le Monde.fr/ 12.12.2015/ Mis à jour le 12.12.2015/ Par Pierre Le Hir
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4 - Paris Climat 2015 / un accord historique sur le climat est adopté à Paris
Après près de deux semaines de tractations intenses, les 195 États réunis à Paris ont accepté sans objection samedi soir un accord « historique » sur la réduction des émissions des gaz à effet de serre (GES), au terme de la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques, la COP21.
La communauté internationale s'est fixé comme objectif de maintenir la hausse des températures « bien en deçà de deux degrés » par rapport à l'ère pré-industrielle, et même d'essayer de rester sous la barre de 1,5 degré. C'est la première fois que tous les pays s'entendent sur cet enjeu, alors que depuis plus de 20 ans, l'ONU tente en effet de les convaincre de se concerter pour réduire leurs émissions, qui contribuent au réchauffement de la planète, selon le consensus scientifique. L'accord conclu représente un tour de force pour le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius, qui présidait la Conférence.
À la surprise générale, au début d'une plénière attendue depuis le début de la journée et qui tardait encore pourtant à se mettre en branle, M. Fabius, a invité la COP21 à adopter le document, tout à fait banalement et sans aucune objection. Il a ainsi signé sa victoire, devant l'assemblée qui l'a ensuite acclamé. C'est une grande victoire pour la diplomatie française qui voulait à tout prix éviter l'échec de la conférence précédente à Copenhague en démontrant que les négociations multilatérales peuvent fonctionner.
Mais c'est aussi une victoire pour la diplomatie canadienne du jeune gouvernement Trudeau, qui y a fait un de ses premiers tours de piste, qui a joué sa partie et qui voulait marquer une rupture avec le précédent gouvernement Harper hostile à ce genre d'exercice. La ministre de l'Environnement, Catherine McKenna, avait même été choisie comme facilitatrice pour rapprocher les parties par Laurent Fabius.
_ L'accord en bref :
. L'entente prévoit
un financement minimal de 100 milliards de dollars américains par an des pays
développés pour aider les pays pauvres à lutter contre les changements
climatiques, avec des mécanismes de révision à la hausse. Un nouvel objectif
chiffré sera annoncé avant 2025.
. L'accord reconnaît notamment la notion de justice climatique et de
différenciation, c'est-à-dire les efforts financiers que les pays riches et
pauvres doivent faire pour lutter contre les changements climatiques, en
fonction de leurs responsabilités et de leurs moyens.
. Le texte contient aussi la révision à la hausse des engagements, c'est-à-dire
un cycle quinquennal toujours à la hausse des engagements de réduction des gaz
à effet de serre de chaque pays. Mais il n'y a pas d'indication sur la date de
la première révision des engagements des pays et rien sur la révision des
efforts avant 2020.
Mise à jour 12/12/2015 / La Presse Canadienne
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« Océan/ Rôle de régulateur thermique : La COP21 a bien failli oublier un invité de marque : l’océan. In extremis, sous l’impulsion des associations notamment de Tara Expéditions, la thématique a été inscrite au programme officiel de la 21e conférence climatique, comme l’a annoncé le 12 novembre Ségolène Royal, la ministre française de l’Ecologie. C'est une première dans l'histoire des COP. Une journée entière a été consacrée aux océans. «L'océan n'est pas un pays et n'a pas de siège à l'ONU. Pour la première fois nous voulions faire entendre sa voix» explique Romain Troublé, secrétaire de Tara Expéditions qui surveille la pollution des océans.
Pourtant, nos mers sont loin d’être une goutte d’eau dans la machinerie climatique : elles couvrent 71% de la surface du globe et influencent le climat autant qu’elles sont influencées par lui. L'océan constitue d'abord un gigantesque régulateur thermique. «Il amortit 80% de la chaleur crée, explique Bruno David, nouveau patron du Musée national d'histoire naturelle et biologiste marin. Comme une baignoire froide rafraîchit la température de la salle de bain... mais jusqu'à un certain point». C’est aussi un atténuateur de l’effet de serre : le plancton a par exemple piégé 28% des émissions de CO2 d'origine humaine depuis l'ère industrielle. Sans océan, le réchauffement serait donc beaucoup plus intense. »
6 - 150 dirigeants du monde pour un sommet historique (rendre la planète Terre plus habitable et moins polluée est possible)
_ Qu'est-ce que la COP21 ?
Pour la 21e année de suite, les 195 pays membres de l'ONU se réunissent durant une quinzaine de jours autour du climat. Le point de départ de ces conférences annuelles est l'adoption en 1992 à Rio de la Convention-Cadre des Nations unies sur les changements climatiques. Que dit-elle? Il faut stabiliser les concentrations de gaz à effet de serre dans l'atmosphère à un niveau qui empêche toute perturbation dangereuse du système climatique. Jusqu'à présent, aucune conférence, y compris après la signature d'un accord en 1997 à Kyoto, n'a permis d'arrêter la croissance des émissions de CO2.
_ Que va-t-il se passer pendant 15 jours?
Les chefs d'État et de gouvernement, dont la présence est très inhabituelle pour une COP, sont là pour donner une impulsion politique à la négociation et montrer leur détermination à ce que cette fois-ci les 195 pays trouvent un accord, après l'échec de Copenhague en 2009. Mais ils vont repartir dès demain, laissant la place aux négociateurs officiels de leur pays, qui ont pris de l'avance en démarrant leurs discussions dès dimanche. Ces derniers, qui se sont déjà rencontrés plusieurs fois au cours de l'année, ont pour mission d'élaborer pendant la première semaine un texte pouvant servir de base à un accord. À partir de lundi prochain, ils passent le relais à un ministre, le plus souvent celui ayant la charge de l'environnement ou du climat dans leur pays. Ces derniers ont la responsabilité de construire l'accord final. Officiellement, les négociations s'achèvent au bout de la deuxième semaine, vendredi 11 décembre. Mais il est très probable que le sprint final les conduise jusqu'au samedi, voire au dimanche.
_ Quel est l'objectif ?
L'objectif est d'obtenir un accord universel qui englobe les 195 pays, à la différence du protocole de Kyoto de 1997, qui faisait porter la responsabilité et donc les contraintes de diminution de gaz à effet de serre aux seuls pays occidentaux. À l'époque, la Chine était un pays en voie de développement. En 2006 elle est devenue le plus gros pollueur de la planète. Plutôt que de tenter d'imposer des restrictions, il a d'abord été demandé aux pays de prendre chacun des engagements de réduction de leurs émissions (INDC en anglais) en vue de maintenir la hausse des températures en deçà de 2 °C. (On est déjà à plus 0,85 °C). 179 pays l'ont fait, ce qui représente plus de 94 % des émissions de gaz à effet de serre de la planète. Reste à négocier la manière dont ces engagements vont être non seulement mis en œuvre (comment les vérifier, quelle transparence imposer aux pays) mais aussi comment les faire évoluer pour qu'ils soient encore plus ambitieux. Sans oublier un élément essentiel pour les pays les plus pauvres: quels financements vont être mis sur la table pour les aider, après 2020.
_ Cet accord peut-il être contraignant?
En recevant les ONG dimanche, François Hollande a de nouveau plaidé pour un accord «contraignant». Reste à savoir ce que l'on met derrière ce mot. Les États-Unis ont notamment fait savoir qu'ils ne voulaient pas d'un traité qui les obligerait à passer devant le Congrès, à majorité républicaine, hostile à des engagements sur le climat. Il n'est pas non plus question d'un système de sanctions puisqu'il n'existe aucune instance internationale capable de les mettre en œuvre. L'idée est en fait de trouver les mots convenant à 195 pays. Une tâche particulièrement ardue.
_ Quelles sont les forces en présence ?
Ce qui prévalait il y a vingt ans avec les pays industrialisés du Nord responsables historiques des émissions de gaz à effet de serre et les pays du Sud pauvres et victimes, a évolué. Si les plus pauvres aujourd'hui sont toujours ceux qui subissent, le développement industriel de la Chine, de certains pays d'Amérique latine, Brésil en tête, et, dans une moindre mesure, de l'Inde, rebat les cartes. Ces pays émergents veulent bien s'engager, mais ils refusent de sacrifier leur croissance. Les pays occidentaux sont prêts à poursuivre leurs efforts, États-Unis inclus, mais à condition que tout le monde soit dans le même bateau. Quant aux pays les plus vulnérables (Afrique, petites îles…), ils entendent faire pression pour obtenir des financements à la hauteur afin de pouvoir s'adapter aux effets du réchauffement.
_ Les premiers cailloux de la négociation
L'Inde et l'Arabie saoudite ont fait part lors du G20 de leur refus de s'engager sur un calendrier de révision des engagements de chaque pays. En Europe également, la Pologne, qui dépend du charbon pour sa production énergétique, annonce qu'elle pourrait se désolidariser de l'Europe et ne pas signer l'accord s'il devait être trop contraignant pour elle. Et ce ne sont que les premiers soubresauts d'une quinzaine qui s'annonce à hauts risques.
Par Marielle Court / Mis à jour le 29/11/2015 / Publié le 29/11/2015 à 20:29
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7 - COP21 : les océans, invités de dernière minute...
La COP21 a bien failli oublier un invité de marque : l’océan. In
extremis, sous l’impulsion des associations notamment de Tara Expéditions, la
thématique a été inscrite au programme officiel de la 21e conférence
climatique, comme l’a annoncé le 12 novembre Ségolène Royal, la ministre
française de l’Ecologie. C'est une première dans l'histoire des COP. Une journée entière a été consacrée
aux océans. «L'océan n'est pas un pays et n'a pas de siège à l'ONU. Pour la
première fois nous voulions faire entendre sa voix» explique Romain Troublé,
secrétaire de Tara Expéditions qui surveille la pollution des océans.
. Rôle
de régulateur thermique
Pourtant, nos mers sont loin d’être une goutte d’eau dans la
machinerie climatique : elles couvrent 71% de la surface du globe et
influencent le climat autant qu’elles sont influencées par lui. L'océan
constitue d'abord un gigantesque régulateur thermique. «Il amortit 80% de la
chaleur crée, explique Bruno David, nouveau patron du Musée national d'histoire
naturelle et biologiste marin. Comme une baignoire froide rafraîchit la
température de la salle de bain... mais jusqu'à un certain point». C’est aussi
un atténuateur de l’effet de serre : le plancton a par exemple piégé 28% des
émissions de CO2 d'origine humaine depuis l'ère industrielle. Sans océan, le
réchauffement serait donc beaucoup plus intense.
Mais tout le problème aujourd’hui est de savoir jusqu’à quand il pourra assurer
ces services. «Difficile de donner une date précise, concède Bruno David.
Il faut 1000 ans pour que les eaux se réchauffent uniformément à travers le
monde.» Une goutte de pluie au niveau des Tropiques glisse vers le Nord en
mer de Norvège avant de descendre dans le long des côtes américaines dans
l'Atlantique vers l’Antarctique et de migrer vers les océans Indien et Pacifique
où elles remontent progressivement. Le réchauffement est donc lent, bonne
nouvelle, mais le «retour à la normale» sera aussi long. «On croit qu'on peut
mettre la poussière sous le tapis des océans parce que c'est un tapis
gigantesque mais il va finir par atteindre ses limites», précise Bruno David.
. 0,2
°C en plus par décennie
L'océan, bouée de sauvetage contre le dérèglement climatique,
est aussi une de ses premières victimes. Aujourd’hui, on sait que, depuis
trente ans, les eaux de surface se réchauffent en moyenne de 0,2 °C par
décennie. «On attend un accord ambitieux pour limiter le réchauffement à 1,5 à
2°C d'ici à la fin du siècle sinon l'océan ne pourra plus rendre tous ces
services... ni d'ailleurs limiter le réchauffement», précise Romain
Troublé.
Avec les gaz à effets de serre et l'absorption de CO2 massif, on est aussi en
train de rendre les mers plus acides. «C'est comme si l'on se douchait avec du
jus de citron tous les matins, les effets sur les yeux, et sur la peau ne
serait pas longs à se faire sentir», décrypte Bruno David. Dans nos mers, les
récifs coraliens par exemple meurent parce qu'ils sont incapables de se
déplacer plus au nord. D'autres espèces migrent, comme les barracudas qu'on
trouvent désormais couramment en Côte d'Azur où ils dévorent les bars. Il
faudra peut-être bientôt dire adieu aux plateaux d'huîtres d'Oléron, parce
qu'avec le PH qui devient acide, ces fruits de mers ont de plus en plus de mal
à sécréter le calcaire de leur coquille...
Le Parisien / 04/12/2015
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